14-15 mars 2016 – En route vers l’inconnu
Inconnu… pour nous ! Marie-Xavier et moi n’avions jamais été à l’île Maurice. Et cette fois-ci nous avons une bonne raison pour y aller : plonger avec les cachalots, en compagnie de nos amis René et Yukimi Heuzey et François et Véronique Sarano. Dire qu’on est heureux d’être dans l’avion, même si le vol Paris-Maurice est long (11 heures) !
Mais tout finit par arriver, et nous voilà, tôt le matin, amorçant la descente vers l’île mythique.
Il n’y a plus qu’à récupérer nos bagages, et le séjour – dont on rêve depuis des mois – peut commencer !
Mais voilà… Nos bagages ne sont pas là ! Et pourtant, il n’y avait que deux pièces, qui n’ont fait que Luxembourg-Paris, avec une escale de 4h à CDG. Et bien, faudra faire sans, pour le moment. Un peu embêtant, tout de même : les médicaments de Marie-Xavier se trouvent dedans ! Déclaration de perte de bagages, location de voiture, nous voilà par 28°C, bien chaudement habillés (au Luxembourg il faisait 1°C à notre départ)… On transpire !
16 mars 2016
Bagages arrivées avec 24h de retard. Ouf ! On sentira un peu moins mauvais !
L’île Maurice en quelques mots
La République de Maurice (île Maurice et île Rodrigues) se trouve dans le sud de l’océan Indien, à l’est de l’île de la Réunion et Madagascar, à 2000 km environ du continent africain. Sa superficie est de 2040 km carrés, sa capitale est Port Louis.
Quand les premiers explorateurs portugais mirent pied dans l’île en 1498, elle était inhabitée. Suivirent les Hollandais en 1598 (toujours là, où il ne faut pas, ceux-là !) C’est eux qui lui donnèrent le nom de «Mauritius», en l’honneur du Prince Maurits van Nassau, souverain hollandais de l’époque. Quand les Hollandais abandonnèrent Maurice en 1710, car peu rentable, ils avaient exterminé un animal indigène, le «Dodo», oiseau dépourvu d’ailes et donc une proie facile. En revanche, ils avaient importé la canne à sucre, et ce qui va avec : des esclaves. Suivit une période de colonisation française, pendant laquelle l’île s’appelait «Isle de France». Pendant leurs guerres contre Napoléon, les Anglais prirent possession de l’île qui fut rebaptisée «Mauritius» en 1810. L’esclavage fut aboli en 1835 et l’île devint un État indépendant le 12 mars 1968.
Cet héritage historique mouvementé se traduit par une riche diversité ethnique (personnes d’origine indienne, africaine, chinoise et européenne) dans ce pays plurilingue où l’on parle anglais, français, créole et plusieurs langues asiatiques.
Une curiosité est le «Blue Mauritius», l’un des timbres les plus rares (et donc les plus chers) au monde, créé le 21 septembre 1847, 7 ans à peine après la création du tout premier timbre postal, en Angleterre, le «Penny Black».
Premières impressions – la végétation
Luxuriante végétation tropicale, des palmiers aux banians, en passant par la canne à sucre, la vanille et des fleurs exotiques. Vert intense. 32°C à l’ombre, alors qu’à la maison il fait 2°C. Dépaysement total !
La canne à sucre
En parcourant l’île, on rencontre des champs de canne à sucre à perte de vue.
La canne à sucre (genre Saccharum) est une grande graminée tropicale herbacée d’une hauteur allant de 2,5 à 6 mètres. Les tiges, d’un diamètre de 1,5 à 6 cm, contiennent une sève riche en sucre. Avec un volume annuel de production supérieur à 2,2 milliards de tonnes, c’est la première plante cultivée au niveau mondial avec plus de 20 % de la masse agricole totale produite dans le monde (plus que le blé, le riz ou les pommes de terre !). Jusqu’au début du 19ème siècle, la canne était la seule source importante de sucre et représente toujours actuellement 70 à 80 % de la production mondiale.
Les tiges sont broyées dans un moulin et produisent un liquide sucré, le jus de canne, qui donne, après évaporation, le sirop de canne, qui est clarifié puis concentré pour en extraire le sucre cristallisé brut, la cassonade. Celle-ci donne le sucre roux, qui sera ensuite éventuellement transformé en sucre blanc dans une raffinerie.
Mais le jus peut aussi être fermenté pour donner un liquide alcoolisé. Après distillation, on obtient un rhum blanc : le rhum agricole. Si on laisse vieillir celui-ci dans des futs de chêne, on obtient un rhum ambré.
Finalement, on peut laisser macérer dans le rhum des fruits ou des herbes : vanille, café, mangue, etc. C’est le «rhum arrangé»
Une ancienne sucrerie abandonnée, sous la pluie tropicale
Le thé
Lorsqu’on quitte la plaine avec ses cultures de canne, dans les hauteurs de l’île on peut tomber sur les cultures de thé.
Après la cueillette, manuelle ou mécanisée, les feuilles sont rentrées dans l’usine pour la «flétrissure». En 24h, elles perdent 30% de leur poids.
Les feuilles sont ensuite hachées, puis subissent une fermentation pendant une heure-et-demie. Suivent le séchage, d’autres découpages, et la séparation des tiges et fibres à l’aide de rouleaux chargés en électricité statique.
Le thé peut être emballé «pur» ou après le rajout d’arômes naturels : vanille, cardamome, caramel, bergamote… Le conditionnement peut être en vrac dans des paquets…
…ou alors se faire en sachets de 2 grammes, un processus hautement automatisé.
Suivent l’emballage pour le marché local (les Mauriciens sont de grands buveurs de thé) ou pour l’export. Le thé mauricien se retrouve chez nos grandes enseignes.
Les conditions de travail des ouvriers nous paraissent parfois très pénibles : chaleur, bruit et machines d’un autre âge pouvant présenter des risques d’accident. Pas sûr que l’inspection du travail suive les mêmes normes qu’en Europe !
À tous les stades, il faut mesurer : vitesses, températures, poids…
La vétusté des locaux s’accompagne d’une architecture photogénique.
Un monde d’illusions
Nous vivons dans un monde d’illusions, où nous nous fions, à tort parfois, à nos sens. On peut rêver, comme Marie-Xavier, d’ouvrir un coffre fort dont jaillit la fortune…
On peut, dans un monde imaginaire, se lier d’amitié avec une pieuvre.
Nous sommes rentrés dans une exposition interactive, où tout n’est qu’illusion… Comme cet ascenseur, dont le fond s’est effondré, nous laissant devant le précipice du puits d’ascenseur…
Ou cette pièce, où nous avons pu nous asseoir au plafond !
Nous avons voulu nous enfuir de ce monde irréel, mais pour cela il y fallait sortir d’un labyrinthe fait de vrais et de faux passages, constitué d’un ensemble de miroirs où nous avons cru nous perdre réellement !
La vérité des relations humaines au sein de notre couple nous fut révélée dans une autre chambre…
Non, nous n’avons pas été transformés ! Et nous avons retrouvé un monde bien réel. Quoique… Mais nous avons bien compris que la réalité reste une chose bien subjective.
À partir de demain – nous allons retrouver notre sérieux… Promis !
Nos premiers cachalots
Sortie en mer aujourd’hui. Nous sommes ici dans le cadre d’une étude de longue durée mission sur les cachalots, avec nos amis, le biologiste François Sarano et le caméraman René Heuzey. Plusieurs organisations prennent part à ce projet «Maubidick», dont la Marine Mega fauna Conservation Organization (M2CO) et Longitude 181. Un des buts de la mission est de dresser des cartes d’identité des différents individus. À ce jour, 54 animaux ont été identifiés. Le programme prévoit d’évaluer la dynamique de la population. En cette saison, la plupart des mâles sont repartis chasser vers l’Antarctique, mais les femelles (qui peuvent mesurer jusqu’à 11 mètres pour 20 tonnes) et les jeunes restent dans les eaux de l’île Maurice. Aujourd’hui, nous avons observé un groupe de huit individus, dont Caroline et Vanessa, des matriarches d’un groupe qu’on ne voit pas souvent. Et ce n’est qu’un début !
Pas vu – pas pris !
Le blog de ce jour, 22 mars 2016, a failli s’appeler ainsi. Car nous avons navigué des heures durant devant la côte mauricienne, et tout ce que nous avons vu était la Pointe de Mire, un cap ressemblant à un cachalot. J’ai fini par penser : «Pas vu de cachalots, pas pris de photos !» Mais heureusement, juste avant de rentrer, nous avons rencontré un groupe de quatorze individus. Déjà en surface, c’était impressionnant :
À noter l’évent excentrique, dirigé vers la gauche, typique pour les cachalots. Quelques rencontres rapides et éphémères sous l’eau, malheureusement dans une eau peu claire, chargé de particules.
Pas vu, pas pris ! (2)
Ce qui devait (peut-être) arriver, arriva : nous avons passé toute la journée en mer sans voir l’ombre d’un cachalot… Frustrant ! En revanche, on à pu admirer la côte mauricienne, avec ses étonnantes montagnes basaltiques :
De retour à notre hôtel, un somptueux coucher de soleil nous console de notre frustration :
Alors qu’un lézard bien vert à côté de notre chambre tente de remplacer les cachalots.
Jeudi 24 mars 2016 – deux heures avec les géants
Après de longues heures de navigation le long de la côte ouest de Maurice, nous tombons enfin sur deux groupes de cachalots qui croisent vers le nord. On assiste à quelques sauts spectaculaires, destinés entre autres à se débarrasser des peaux mortes. Il en faut, de la force, pour sortir 20 tonnes de l’eau !
Ensuite, nous nous mettons à l’eau chaque fois que notre bateau rattrape les animaux. Les rencontres se succèdent.
René Heuzey, notre cinéaste sous-marin, montre ici la taille des cachalots. Ici, il s’agit d’une femelle moyenne. Un mâle adulte peut être deux fois plus grand !
Une femelle avec son «petit»…
Après ces rencontres extraordinaires, de retour à Port aux Biches, voici l’équipe au complet – sourires garantis !
De g.à dr. (debout) : François, Yann, Audrey, René, Véronique, Daniel, Marie-Christine, Marie-Xavier, Nicole, Alexandre – (accroupis) : Steven, Axelle, Navin, Axel et Stéphane… et une petite fortune de matériel de prises de vue sous-marines !
25 mars 2016 – L’apothéose !
Ce matin, on les a trouvés rapidement. Un attroupement en surface, où les animaux socialisaient, les juvéniles en jouant.
À l’approche du premier groupe d’observateurs, les cachalots ont eu une réaction très étrange. L’un d’entre eux (ou plusieurs individus ?) a déféqué, et ils se sont tous mis à tournoyer dans ces excréments, créant ainsi un «écran de fumée» entre eux et les humains.
Mais le calme est vite revenu et cela n’a pas empêché, peu de temps après, de les observer à l’aise. Voici quelques images des rencontres d’aujourd’hui :
Étant peu satisfait des couleurs de mes photos sous-marines, je les ai converti en images monochromes, dont voici un échantillon :
Finalement, on a eu la chance d’assister à de nombreux sauts en surface.
Une journée inoubliable !
26 mars 2016 – dernier jour à Maurice
Encore une belle journée et des rencontres avec des cachalots. Malheureusement, l’eau n’était pas très claire et la visibilité réduite. Je mets juste quelques photos pour finir cette semaine extraordinaire.