Le défi
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Ayant pris connaissance du raid de 1907, je décide de faire, exactement un siécle plus tard, la route Paris-Pékin avec «La Petite»…
Après des mois de préparatifs, côté mécanique par l’équipe de «Gazoline» à Bailly, côté logistique chez moi, et après un faux départ le 17 juin, ça y est enfin: le 26 juin 2007, je rallie Paris à Luxembourg. C’est un modeste début, mais c’est la route de l’Est. L’aventure a commencé.
Le 30 juin, les 125 (!) équipes (sur les 134 qui étaient au départ) du «The Peking to Paris Motor Challenge», un rallye parti de Pékin le 27 mai, sont passés au point de contrôle de Nennig en Allemagne, à 25 km de chez moi. Je suis allé saluer ceux “qui l’ont fait”, avant de m’attaquer au même challenge en sens inverse.
La «Petite» était confrontée à des voitures prestigieuses: Talbot, Lancia, Rolls-Royce, Bugatti, Sunbeam, Bentley, MG, Lagonda, Delage, Jaguar, Alvis, Itala, Knox…
Il était clair aussi qu’il s’agissait là d’une autre catégorie de voyageurs, des personnes ayant les moyens de leurs ambitions ! Mais il faut quand même oser lancer des voitures, valant une petite (et parfois une grande!) fortune sur les routes du Gobi et de Sibérie!
Un des organisateurs m’a dit en regardant ma «4CV», très basse : «Vous y allez avec ÇA…?! Vous êtes un homme courageux…» (ce qui voulait clairement dire : vous êtes cinglé!). On m’a prédit amortisseurs cassés, galerie arrachée par les cahots, pneus en lambeaux… Et pas de service de ramassage… Chouette!
Je suis rentré impressionné par toutes ces belles mécaniques, les équipages courageux et aussi par les cicatrices laissées par le rallye! Je ne sais pas encore ce qui m’attend… Mais il est sûr que ce ne sera pas toujours facile.
Le même jour, mon compagnon de route et copilote Igor Zadevalov, a débarqué au Luxembourg. Avec ce Sibérien de souche à mes côtés, je pars confiant!
Je pars, non pas pour faire de la route, mais pour rencontrer des gens, voir des paysages, vivre le dépaysement. Je pars pour un premier périple de sept semaines et près de 12.000 kilomètres, pour “vivre au quotidien la voiture ancienne” comme le dit si joliment le slogan de «Gazoline».
Ma voiture ancienne est une Renault «4CV» de 1959, affectueusement baptisée «La Petite». Nous avons déjà parcouru ensemble une partie du méridien de Greenwich, la Nationale 7 et les Alpes… Des broutilles quand je compare avec la ligne rouge de Paris à Pékin que je me suis tracé sur un mappemonde.
Jusqu’où arriverons-nous? D’aucuns me prédisent que je n’irai pas loin. Certains craignent le pire. Mais il n’y a rien à faire: il faut que je parte! J’ai décidé de tenir un journal de bord détaillé que je mettrai sur Internet le plus souvent possible. Ce “blog” a été suivi par des centaines de personnes tout au long du périple. En voici quelques extraits.
Pour lire le récit complet, au jour le jour, il y a le livre Paris-Gobi.
Samedi 7 juillet 2007. Départ de la “Philharmonie” de Luxembourg, en présence de centaines de personnes. «La Petite» est accompagnée jusqu’à la frontière allemande par une superbe escorte de pas moins huit «4CV» rutilantes. À Wasserbillig, la colonne fait demi-tour et c’est seule que ma «4CV», immatriculée RT444, rentre en Allemagne. «La Petite», Igor et moi sommes enfin lâchés sur la route de l’Est… Igor me serre la main. On s’écrie «Païakhali!» (Allons-y!), à l’image de Youri Gagarine, il y a 45 ans, avant qu’on le lance dans le cosmos. Notre aventure est certes plus modeste que celle du premier homme de l’espace, mais à notre échelle, elle est grande.
Nous empruntons la «Weinstraße» avec ses magnifiques vignes tirées au cordeau: quel boulot! Puis, ce sont les côtes du Hunsrück. «La Petite» les avale sans problème, malgré sa lourde charge. En descendant vers le Rhin à St. Goar, une pente très raide, les freins sont lourdement sollicités. Nous traversons le grand fleuve près du célèbre Lorelei, puis contournons Francfort par le Nord. Vers huit heures du soir, nous dressons notre tente dans un pré en lisière de forêt entre Gießen et Fulda. Le réchaud ronronne, nous dînons. Crevés mais heureux, nous nous glissons dans nos sacs de couchage. Un oiseau nocturne nous salue de ses cris. Nous nous endormons…
Dimanche 8 juillet 2007.
Nous nous réveillons aux sons de cloche du monastère en contrebas, dans une nature splendide. Notre premier campement est une merveille! Le soleil éclaire les champs brumeux. Nous prenons nos habitudes: toilette à la vache à eau posée sur l’aile de la voiture, petit déjeuner, remballage… On quitte l’autoroute à Friedewald, pour y photographier le premier “témoin du voyage”. Tous les 1000 km (depuis Paris) nous ferons ainsi un portrait.
À Mittelshausen près de Bettingen, nous tombons sur une montagne gigantesque résultant de l’exploitation d’une des énormes mines de sel de la région. Paysage incroyable: on se croirait sur les flancs d’un volcan! Dans le même village, il y a une “Weinbergstraße”, la rue Weinberg !
Lundi 9 juillet 2007.
À Dresde, j’ai rendez-vous avec des représentants de l’Association du «13 février 1945». C’est la date du terrible et controversé bombardement allié qui, en quelques heures, a transformé cette ville d’art en un brasier géant, proie aux flammes d’une “tempête de feu” allumé avec une précision chirurgicale. C’est dans la mairie de Dresde que je suis reçu par une délégation de quatre septuagénaires, dont Anita John, qui a survécu par miracle dans une cave où tout le monde, y compris ses parents, est mort par asphyxie, le feu environnant consommant tout l’oxygène.
Mardi 10 juillet 2007. Toujours à Dresde, nous commençons par faire une photo avec la «4CV» en parallèle avec une vieille carte postale dans le parc «Großer Garten».
À 82 ans, Rudolf Eichner a un regard bleu d’enfant et la démarche d’un quinquagénaire. Et pourtant… En octobre 1944, appelé sous le drapeau hitlérien, il combattait en Ukraine, où il est grièvement blessé par des éclats d’obus. Il est rapatrié dans un hôpital de Dresde. Juste à temps pour se retrouver sous les bombes anglaises la terrible nuit du 13 février 1945… Il nous promène dans Dresde et nous montre des points marquants. Comme moi, il compare “avant et après”. Seulement ses photos montrent Dresde avant le bombardement (merveilles d’architecture baroque, une ville vivante) et après (des étendues de ruines et de gravats, des milliers de morts). Il nous indique des rainures dans les dalles de granit des trottoirs: «C’est mon traumatisme. Je les vois partout: ce sont les traces des bombes explosives.»
Mais l’essentiel des dégâts a été causé par les dizaines de milliers de bombes incendiaires lâchées par les avions Alliés: des bâtonnets de 3 kg, destinés à casser les tuiles des toits et d’allumer des feux à l’intérieur des maisons. Les incendies se rejoignaient pour finir par n’en former qu’une grande, qui faisait appel d’air: la tempête de feu était un fait. Des tornades soufflaient dans les rues, précipitant parfois les gens dans les flammes. L’asphalte brûlait et fondait, clouant les fuyards sur place. Nous déjeunons avec une autre survivante du bombardement de Dresde, Nora Lang, qui s’entretient avec Igor dans un Russe presque parfait. Nora me montre une photo d’enfance: «Elle a été prise deux ans avant le bombardement.» On y voit une jeune fille innocente, dont le seul crime était de vivre sous un régime criminel. Méritait-elle, et les autres habitants de la ville, le sort cruel qui leur était réservé?
La gare de Dresde d’avant la Deuxième Guerre Mondiale. Totalement détruite en février 1945, elle a été reconstruite après le guerre. «La Petite» pose devant.
Toujours à Dresde, en dehors des trois (!) Weinbergstraße de sa banlieue, nous retrouvons un «Café Weinberg» qui existe depuis près d’un siècle et dont j’avais déniché une vieille carte postale! Il pleut des cordes et j’aurais bien aimé y boire un chocolat chaud. Le café est toujours là, mais à ma grande déception il est fermé.
Mercredi 11 juillet 2007
À la frontière germano-polonaise, nous visitons la vieille ville de Görlitz, joyau d’architecture baroque, dont les guides ne parlent jamais. Ville calme, rues pavées de granit, panneaux de rues en lettres gothiques… J’ai l’impression de visiter la Silésie d’il y a un siècle, quand mon père y est né. Nous franchissons la frontière polonaise et dormons chez l’habitant près de Boleslawiec.
L’école pour jeunes filles de Liegnitz l’allemande est devenu cloître bénédictin dans la ville polonaise de Lignica.
À Wroclaw, l’ancienne ville allemande de Breslau, où mon père est né en 1910, la «Petite», délestée de ses caisses pour la nuit, fait un tour de la ville, à commencer par ce pont “Jugendstil” sur l’un des bras de l’Oder, l’ancien «Dombrücke» que Papa a dû connaître quand il était gamin!
Ensuite, on pose devant l’entrée principale de l’Université, qui a fourni pas moins de neuf Prix Nobel!
La visite de la ville nous mène vers un château d’eau dans le sud-ouest de la ville, non loin de la maison natale de mon père.
Finalement, arrêt devant la Ulica Gajowicka no.195, jadis la Gabitzstaße no.195, la maison de mes grands-parents, avant qu’ils ne soient expropriés par les Nazis en 1939. La «Petite» est garée au même endroit que la BMW «Dixie» de mon père dans les années 1930!
Jeudi 12 juillet 2007
Blachownia (Blechhammer), sur la rivière Klodnica (Klodnitz) est l’endroit d’un gros complexe pétrochimique, connu pendant la deuxième guerre mondiale pour l’usine «Schlesische Hydrierwerke», où les Allemands fabriquaient du carburant synthétique à partir de charbon. C’était également l’emplacement d’un camp annexe d’Auschwitz. C’est ici que mon père fut libéré par l’Armée Rouge Soviétique le 21 janvier 1945, ayant survécu aux terribles “marches de la mort”. Je photographie le portrait de papa devant ce qui reste de l’enceinte du camp.
Visite d’Auschwitz II Birkenau. La «Petite» semble bien intimidée devant la tristement célèbre «Porte de la Mort» par où passaient les convois ferroviaires de déportés, dont une demi-douzaine de membres de ma famille qu’on n’a jamais revus…
Samedi 14 juillet 2007
Longue matinée frustrante à Cracovie, que j’ai passé devant l’écran d’un ordinateur dans un Internet café pour tenir au courant mes “fans”, au lieu de me promener dans cette très belle ville. Heureusement que je la connaissais – c’est ma troisième visite… J’ai juste le temps de faire une photo de la célèbre “Halle aux draps” sur le Rynek.
Dimanche 15 juillet 2007
Nous nous promenons longuement dans la ville de Przemysl (essayez de prononcer ça!), ville datant du VIIIe siècle, mais qui a surtout beaucoup souffert lors des deux Guerres Mondiales. Je retrouve le pont de chemin de fer, presque inchangé depuis cette photo ancienne que je possède, et qui montre des soldats allemands escortant des colonnes de Juifs vers les premières exécutions en masse effectuées par les tristement célèbres «Einsatzgruppen».
Lundi 16 juillet 2007
En Ukraine, les premières églises orthodoxes.
Mardi 17 juillet 2007
Avant d’atteindre la ville de L’viv, nous goûtons au plaisir d’une route de campagne ukrainienne. À prendre avec précaution!
Nous passons la journée à Odessa. Repos pour la «Petite». Nous tombons sur une magnifique limousine «Zim-12» de 1953. Jadis la voiture de la “Nomenklatura”, elle gagne son pain avec des mariages maintenant.
Vendredi 20 juillet 2007
Voici le célèbre «Escalier Potemkine» d’Odessa, immortalisée dans une des scènes les plus célèbres du cinéma mondial, dans le film «Potemkine» de Serguei Eisenstein: le landau qui dévale les marches lors de la révolte réprimée dans le sang. J’ai fait mes repérages hier: arrêt interdit pour la voiture, puis plus de deux cents mètres à faire au pas de course pour arriver sur le pont d’en face… Je cours, je transpire, mais je l’ai, la photo de la «Petite» devant l’escalier monumental! Igor a du mal à me voir braver autant d’interdits…
Sous une chaleur écrasante, nous arrivons au Palais des Khans, à Bakhtchisaraï. Merveille d’architecture orientale, fondée il y a 500 ans par l’un des khans tatares. Avec ses minarets, ses fontaines, ses ornements, ses jardins, on se croirait en plein 1001 nuits… La vieille femme Tatare y fait le ménage.
Dimanche 22 juillet 2007
Nous essayons, en vain, de trouver un des campings indiqués sur la carte. Retour vers le nord. Nous contournons Sébastopol pour nous retrouver dans une toute petite station balnéaire: Lioubimivka. Le camping annoncé ne s’y trouve pas non plus. Nous sommes trempés de sueur. Finalement, Igor nous dégote une sorte de mini-bungalow dans un sympathique village de vacances, géré par Ludmila Ivanovna Ptitzina. Cinquante ans, un beau sourire, elle est l’épouse d’un colonel pilote de chasse à la retraite. De 1976 à 1992, son époux volant sur MiG 25 et 29, ils ont dû déménager sept fois. Je pose des questions. Avait-elle peur quand son mari volait? «Tant que j’entendais les avions, j’étais rassurée. C’est le silence qui faisait peur: était-il arrivé quelque chose?» Comment avait-elle perçu la Guerre Froide? «Ce sont les Américains qui nous ont toujours précédé dans la course aux armements. On était bien obligés de suivre. Mais je n’ai jamais eu peur d’une vraie guerre. Personne ne se serait lancé dans un conflit sans espoir!» C’était mieux avant ou après la Péréstroïka? Elle m’adresse un sourire énigmatique. «Les deux ont des aspects positifs.» Mais quand j’insiste, la balance penche plutôt côté Ancien Régime: «Avant, nous avions plus d’espoir et de confiance dans l’avenir. Maintenant, il y a plus de choses dans les boutiques…», et elle tempère «…pour ceux qui ont de l’argent!»
Nous quittons Sébastopol, dont nous garderons un très bon souvenir. Comme les couleurs du monument soviétique à la sortie de la ville s’accordent si bien avec les caisses sur le toit de la «Petite», je ne résiste pas à la tentation de faire une photo intitulée «Rhapsody in Red». Pauvre Gershwin…
À Aloushta, nous rencontrons Envjer Emir-Alievitch Asanov et sa petite-fille Elina Ibrahimova, 15 ans. Ce sont des Tatares de Crimée. Dans les années cinquante, Staline a fait déporter beaucoup de membres de cette ethnie. Envjer s’est ainsi retrouvé à Bokabad en Ouzbékistan, où il est devenu ingénieur et où il a travaillé pour une compagnie de trolleybus. C’est un mécanicien pur sang, qui demande (comme beaucoup d’hommes) à jeter un coup d’oeil sous le capot du moteur de la «Petite». Il s’étonne tout de suite de la dimension du carburateur: un connaisseur! De retour en Crimée depuis 1989, il vient à Aloushta avec Alina, vendre ses melons et autres produits de leur village, situé à 160 km. Ils dorment alors tous les deux dans la vieille «Lada» délabrée à côté de laquelle nous nous sommes garés. Quand nous partons, il nous offre quatre melons.
Les Ukrainiens conduisent parfois comme de véritables kamikazes. Pas étonnant dès lors, de voir d’innombrables monuments et stèles mortuaires le long de la route, témoins des nombreux accidents qui s’y produisent.
Mercredi 25 juillet 2007
La première ville russe s’appelle Taganrog, où nous trouvons une boutique avec un Tour Eiffel dans son enseigne. C’est le «A» dans le nom «ПАРИЩ» (= Parish, Paris), le même qui figure sur nos cantines rouges!
Jeudi 26 juillet 2007
Ces yeux ont tué: pendant la guerre d’Afghanistan il a été “sniper”… Il a bien voulu poser pour la photo, mais il n’a pas dévoilé son nom. Il essye d’oublier cette période dramatique de sa vie. Il sent très fort l’alcool… Nous sommes à Rostov-sur-le-Don.
Samedi 28 juillet 2007
Une locomotive de l’ère communiste est fièrement exposée sur les bords de la route, juste avant l’entrée de Volgograd, l’ancienne Stalingrad. La «Petite» a l’air encore plus minuscule à côté de cette mécanique impressionnante!
À Volgograd, nous visitons le monument érigé en souvenir de l’héroïque bataille de Stalingrad. C’est un complexe de statues, de bas-reliefs, de stèles, de plaques commémoratives, surmontée d’une statue gigantesque: «Rodyena-Madj» (La Mère Patrie). C’est la plus grande sculpture d’Europe, avec ses 85 m de haut et son épée de 32 m. À ses pieds, les nombreux visiteurs ressemblent à des fourmis. Juste à côté, une église orthodoxe.
Lundi 30 juillet 2007
Nous avons fait du camping sauvage juste avant Saratov. De toute façon, il n’existe pas de campings organisés dans ce pays et ce n’est pas grave, je préfère être totalement indépendant. Quand je dis: “sauvage”, cela veut dire parfois qu’avec la «4CV» on fait carrément du tout-terrain parmi les hautes herbes sauvages pour trouver un bon emplacement. Je suis convaincu que la «Petite» est capable d’aller (presque) partout; on n’a pas besoin de 4×4 pour faire du hors piste, il suffit juste de conduire lentement en étudiant bien le terrain. Bon entraînement pour la Mongolie! Pour tenir à jour mon blog, tous les jours ou presque, je sors mon MacBook, je transfère et choisis les photos du jour, je les édite et puis il faut encore écrire le texte et le traduire en Anglais. Ensuite, il faut trouver un café Internet (pas toujours évident…) et mettre le tout en ligne. Cette dernière procédure est assez lente. J’estime que je passe presque autant de temps au clavier qu’au volant!
Mardi 31 juillet 2007
À Samara, nous nous rendons à un garage pour réparation du pot d’échappement, le réglage des freins, le vidange d’huile et pour réglage de l’avance à l’allumage et du carburateur. Une petite armée d’ouvriers plus un patron se sont occupés amoureusement de la «Petite» pendant cinq heures. La facture s’élève à… 1000 roubles (30 euros). Entretemps, un grand père et sa petite fille Sacha se sont approchés de la voiture qui nous attend dehors. Je photograpie la petite dans la «Petite», l’une étant aussi charmante et séduisante que l’autre!
Mercredi 1 août 2007
Pendant nos arrêts, nous rencontrons beaucoup de camionneurs. Ils nous admirent comme nous les admirons. Vu la route et la circulation, ils ont du mérite à faire du Moscou-Vladivostok (9500 km) à bord de leurs «Kamaz», «Oural», «MAN», «Volvo», «DAF», «Renault» et autres mastodontes… Nous discutons. Et ils repartent avec un autocollant «Gazoline» sur leur camion. En Russie, on ne connaît plus qu’une voiture: la «Petite», et une revue: «Gazoline»!
Nous sommes donc sur une autoroute. La M5 est l’axe principal reliant la capitale à la Sibérie. C’est tout droit, long et monotone. L’état de la route varie de “passable” à “effroyable”, la moyenne se situant autour de “mauvais”! Des ornières parfois profondes de 20 à 30 cm sillonnent la chaussée, des nids de poule aux bords tranchants arrivent souvent mais jamais quand on s’y attend, et la circulation… n’en parlons pas!
C’est très fatigant à conduire et de temps à autre je m’arrête et m’effondre, épuisé, pour faire une petite sieste réparatrice.
Après une bonne nuit passée près du village de Kob-Pokrovka, nous filons vers la ville d’Ufa. Contrôle policier à l’entrée de la ville, comme d’hab. Deux flics sympas vérifient en rigolant comment deux adultes tiennent dans une «4CV»… Il est vrai qu’en les voyant installés, avec leurs énormes casquettes et leur Kalachnikov, on y croit à peine! Ils nous souhaitent «Shaslyvôvô pouty» (bonne route) et on rentre dans la ville.
Vendredi 3 août 2007
Nous nous approchons de la ville de Zlataoust. Cela faisait longtemps que je ne vous avais pas parlé du raid Pékin-Paris de 1907, tout simplement parce que nous n’étions pas encore sur la même route qu’eux (de l’Oural, ils avaient pris la direction de Moscou alors que nous venons de Crimée). Mais ici, dans l’Oural, nous revoilà sur les traces des Borghese, Cormier, Collignon et Godard. Nous retrouvons sans peine l’endroit photographié par Cormier, il y a exactement un siècle. Sa description minutieuse correspond encore bien à la situation actuelle.
Juste à l’Est de Zlataoust, nous arrivons au monument qui marque la frontière entre l’Europe et l’Asie. Nous nous faisons photographier, chacun dans son continent de résidence! Je cite Georges Cormier qui écrivait ceci, il y a un siècle:
«Nous voici à la limite de deux parties du monde. Pour la première fois, deux automobiles, venant de cette ville archi-séculaire qu’est Pékin, ont traversé l’Asie de bout en bout, pour escalader les pentes de l’Oural. Elles vont franchir cette frontière et rentrer en Europe et c’est nous qui les avons amenées ici.»
Ce pionnier de la route ne pouvait pas deviner quel serait, un siècle plus tard, le flot incessant de camions de plusieurs dizaines de tonnes qui déboule sur la M5!
Samedi 4 août 2007
Partout, le long de la route, des gens proposent champignons, myrtilles et autres baies fraîchement cueillis. Nous achetons un kilo de baies délicieuses pour 100 roubles (3 euros).
Dimanche 5 août 2007
Iékaterinbourg. Près du site de l’assassinat des Romanov, proclamés Saints depuis, a été bâtie l’Église du Sang. Tout autour, des photos géantes du Tsar Nicolas II, de la Tsarine Alexandra, du Tsarévitch Alexeï, des filles Olga, Tatiana, Maria et Anastasia, devant lesquelles déambulent des femmes au foulard, signe de leur appartenance à l’église orthodoxe.
Lundi 6 août 2007
Journée spéciale: il y a du vent. Du vrai! On peut enfin faire du KAP (Kite Aerial Photography: photographie aérienne à partir de cerfs volants) sans trop de problèmes. Près de Tougoulim, nous faisons des photos de la «Petite» sur une route sibérienne et d’Igor consultant l’Atlas routier sur le capot.
Mardi 7 août 2007
Cela fait un mois que nous sommes partis et on totalisera aujourd’hui 8059 km, une moyenne journalière de 250 km environ. Ce n’est pas beaucoup, mais je l’avais annoncé: nous ne sommes pas partis pour faire vite mais pour faire en profondeur. On se donne le temps. Nous voici entre Iekaterinbourg et Omsk.
Mercredi 8 août 2007
Dans ma besace, j’avais cette ancienne carte postale montrant les équipes des deux «De Dion-Bouton» du raid Pékin-Paris de 1907, avec ce titre: “60 verstes après Omsk – déjeuner dans la steppe”. Pour nous, roulant dans l’autre sens un siècle plus tard, ce serait donc 65 km avant Omsk qu’il fallait recréer la scène. Nous trouvons sans problème un chemin de campagne à moins d’un kilomètre de la photo ancienne et déjeunons dans un pré fleuri. Vous aimez les “avant-après”, comme moi?
Mais nous disposons d’un atout que n’avaient pas nos illustres ancêtres. On lance le KAP. Le vent est si stable que le cerf-volant tient tout seul en l’air, attaché à un piquet vissé dans le sol. Et nous photographions notre déjeuner vu par les hirondelles! La“route” empruntée jadis par les équipes de Cormier et Collignon ne devait pas être très différente de notre chemin de terre!
Jeudi 9 août 2007
Hier soir, après la douche qui s’imposait après de multiples ennuis avec la voiture, nous avons trouvé (difficilement, car il était déjà tard) un restaurant qui servait encore. En fait, c’était une sorte de boîte de nuit, où les gens dansaient et/ou dînaient. À la table à côté de nous, deux jeunes femmes qui dansent remarquablement bien et y prennent un plaisir évident. Il y a une blonde et une brune. La première s’appelle Nastia Shekovskaya (22 ans), la deuxième Galina Zyavarova (19 ans). Les deux travaillent comme magasiniers dans l’usine de pneus «Omskshina» (n’en déplaise à mon sponsor «Michelin» pour cette pub déloyale…) Je leur ai demandé si elles ne voulaient pas refaire leur numéro avec la «Petite» le lendemain matin. Rendez-vous pris, elles se pointent à l’heure à l’hôtel. Il ne pleut plus, mais il fait un froid de canard et il y a un vent à écorner les bœufs. Pas le rêve pour une séance photo! Derrière l’hôtel, une rangée de bouleaux coupe un peu le vent. On se lance à la musique d’un MP3! Étrange ballet de trois charmantes filles, la plus souriante étant sans nul doute notre «4CV»… Nastia a des airs de starlette. Je lui demande de poser comme modèle avec la voiture. Après des débuts un peu hésitants (magasinier dans une usine de pneus ou mannequin pour «Vogue», ce n’est après tout pas le même métier!), elle se prend au jeu et se “lache”.
Vendredi 10 août 2007
Le matin du 10 août, le temps est effroyable: vent et pluie. La température, qui dépassait les 40°C pendant une bonne partie du voyage, a chuté d’une trentaine de degrés. On sort les imperméables et les bonnets. Et l’on se met en route.
Le temps est très instable: tantôt c’est l’averse, tantôt un rayon de soleil illumine le paysage. Lors d’une de ces accalmies nous apercevons un ouvrier agricole qui fauche l’herbe à côté de la route, non loin de la ville de Tatarsk. Nous nous arrêtons et faisons causette pendant qu’il affûte son instrument. Aleksander Ivanovitch Kuznietsov parait plus vieux que ses 55 ans. Quand on voit le dur boulot qu’il fait, cela n’étonne pas… Jadis, il a travaillé sur des tracteurs et des moissonneuses dans le kolkhoze de Severotatarsk.
Samedi 11 août 2007
Elle n’est pas belle, la mariée? Non, la photo ne montre pas une charmante Russe que j’aurais épousée secrètement en Sibérie! Il se trouve que Place Lénine, on tombe sur un mariage. Igor leur propose une séance photo avec la «Petite». Le couple, Alya et Artiom Niekrasove, s’y prête avec plaisir.
Je possède de la ville de Novosibirsk un nombre de photos datant des années glorieuses de la reconstruction d’après-guerre. Ils proviennent d’un livre qui vante le rêve socialiste: hommes puissants travaillant dans la métallurgie, femmes souriantes faisant de la maçonnerie… Il y avait quelques vues de la ville avec des voitures contemporaines de la «Petite». Je ne pouvais pas résister à l’idée de faire une séance “avant et après”, comme je l’avais déjà fait pour la Nationale 7, par exemple. Voici l’école des ingénieurs. La voiture, une «Pabieda» (Victoire) sort d’un portail qui a, hélas!, disparu. Ici, peu a changé depuis les années soixante…
L’école des Ingénieurs du Chemin de Fer il y a un demi-siècle et maintenant.
Lundi 13 août 2007
À Tomsk, de superbes maisons sibériennes centenaires, au bois sculpté, attestent de la richesse passée de la ville.
Sur la route qui mène de Tomsk à Atchinsk, le ciel est noir, la pluie tombe, et dans notre dos le soleil se couche. Soudain s’ouvre devant nous un arc-en-ciel complet et double, comme un portail nous invitant à poursuivre notre progression vers l’Est. C’est magnifique!
Jeudi 16 août 2007
Après avoir traversé toute la ville de Krasnoyarsk (pas une mince affaire avec ses 1,1 millions d’habitants) et l’immense fleuve Yénissei, nous tombons, à la sortie de la ville, sur un globe terrestre. On dirait le même que sur l’emblème de «Gazoline»! Pour permettre à Igor de faire un cliché de la «Petite» avec ce globe, j’en fais plusieurs fois le tour. Ça donnerait presque des idées… Et si, après Pékin…?
Dans l’après-midi du 16 août, nous atteignons la ville de Kansk. J’ai une photo montrant l’arrivée des «De Dion-Bouton» en 1907. Nous quittons la ville en passant devant un portail presque identique, très probablement reconstruit au même endroit que l’ancien!
Plus tard dans l’après-midi, j’ai l’occasion de refaire une photo montrant l’ «Itala» du Prince Borghèse filant vers l’ouest. Nous nous dirigeons dans le sens opposé. J’ai un respect grandissant pour ce que les équipes d’il y a un siècle ont su accomplir, sans cartes fiables, sans pompes à essence, sans routes dignes de ce nom…
Vendredi 17 août 2007
On nous avait bien averti qu’entre Kansk et Irkoutsk, de nombreux tronçons seraient très difficiles, voire impraticables si jamais il pleuvait. Bientôt nous tombons sur les premiers échantillons de cette route malfamée. Nous sommes sur la M53, c’est-à-dire la route principale qui mène de Moscou via Novosibirsk et Krasnoyarsk vers Vladivostok, toutes des villes de plus d’un million d’habitants! La circulation y est très dense: chaque jour, des centaines de voitures importées du Japon et arrivant à Vladivostok partent vers l’Ouest sur cette route…
Dimanche 19 août 2007
Peu après la ville de Tulun, nous nous entretenons avec le propriétaire d’une «Gaz 21 Volga» de 1960, qui s’est arrêté spontanément pour voir la «Petite» de près. À côté de ce colosse soviétique, elle paraît encore plus petite que d’habitude, surtout si en pensée on enlève les deux cantines rouges.
À Telma, elle pose à côté de l’une de ces multiples églises restaurées ou reconstruites qui poussent partout en Russie comme des champignons.
À Irkoutsk, j’ai de nouveau l’occasion de “refaire du neuf avec du vieux”. Première séance photo au Théâtre d’Irkoutsk.
Lundi 20 août 2007
Une équipe de télévision locale (АИСТ = AIST) a été avertie de notre passage, et la «Petite» et nous nous prêtons au jeu des prises de vues et des questions. Grâce au charme et la beauté de la journaliste, Natacha Glouchkova, Igor en a même oublié sa timidité naturelle!
Mardi 21 août 2007
Pour aller d’Irkoutsk à la rive sud du Lac Baïkal, la route passe par la montagne: des montées et descentes raides, jusqu’à 13%, et des virages. Nous la faisons sous la pluie, qui est revenue en force. C’est la première vraie montagne depuis notre départ d’Europe. Dans la descente sur Kultuk, nous faisons une rencontre extraordinaire: sur le bord de la route, une «Citroën 5HP», la voiture de Tintin, avec drapeaux français et russe. Ce sont Élise Pette et Fabien Hamm, de l’Association «Des Routes et des Hommes», qui refont le «Pékin-Paris» de 1907, en épousant le plus fidèlement possible le tracé des pionniers, empruntant tantôt le tracé de Cormier et Collignon (ils passeront par Tchéliabinsk et Zlataoust), tantôt celui du Prince Borghese (ils remonteront jusqu’à Saint Pétersbourg). L’un des buts de leur voyage est de faire de sorte que le raid de 1907 ne tombe pas dans l’oubli, l’autre de récolter des fonds pour aider dans la lutte contre la maladie d’Alzheimer (l’oubli toujours!). J’étais au courant de leur projet, comme ils connaissaient le mien, et nous voilà sous la pluie en train de nous serrer la main et d’admirer nos montures respectives
Mercredi 22 août 2007
Et voilà… Igor est de retour chez lui et heureux de l’être! Depuis le panneau “Ulan-Ude” (l’ancien Verchnié Oudinsk mentionné dans les récits du raid Pékin-Paris de 1907) jusqu’à la maison d’Igor, il reste encore une vingtaine de kilomètres à faire. Nous arrivons Rue Mikoyana. Ensemble, depuis Senningen, nous aurons parcouru 11001 km! Moi, depuis le départ de Paris, j’en ai fait 11583. Je regarde mes mains qui ont tenu le volant de la «Petite» pendant ces 11583 kilomètres. Je caresse, une fois de plus, le galbe de son tableau de bord. Dans mes yeux, rougis par l’attention permanente qu’ont requis ces 11583 kilomètres de routes difficiles, de chauffards, de camions fous, je sens une petite larme monter. Je ne savais pas, au départ, si ce voyage était possible. Je viens d’arriver au bout de la première étape, la plus longue… J’ai hâte de rentrer maintenant. J’ai envoyé un SMS à Marie-Xavier, qui m’appelle sur mon portable. C’est bon d’entendre sa voix. La mienne se noue un peu. De l’émotion chez ce vieux sentimental? Oui!
Samedi 25 août 2007
Après deux jours de démarches administratives (la «Petite» est autorisée à rester en Russie jusqu’au 19 juillet 2008!), on file emmener la «Petite» vers sa demeure d’hiver. Un ami d’Igor travaille dans un entrepôt de produits alimentaires. Le terrain est gardé 24h sur 24h et sur le terrain il y a, parmi tout un bric-à-brac de poutres en bois, de machines délabrées et de vieux camions, un petit abri en fer. C’est pour Elle! Elle ne sera pas au chaud, mais au moins elle sera au sec et loin des mains et des regards indiscrets. Il y a déjà, dans l’abri, une vingtaine de roues de camion qui prennent pas mal de place. Mais la «Petite» mérite bien son nom et elle se contente du peu d’espace disponible. On enlève la batterie. Je la mets sur cales. Avant de lui enfiler son pyjama pour une hibernation de sept mois, je m’installe une dernière fois à son volant. Je ne peux m’empêcher de le caresser: «Petite, tu as été formidable! À bientôt…» Il est vrai que cette voiture n’est plus un objet. Elle est devenu un personnage. Des centaines de fans ont suivi ses périples sur Internet, dont beaucoup d’inconnus. On a tremblé avec Elle sur les mauvaises routes, on l’a encouragé de loin: «Vas-y Petite, tu peux!» C’est fou le charme qu’elle exerce sur les gens! Le dos bien calé dans le siège qui a été le mien pendant sept semaines et près de 12.000 kilomètres, je me rends compte que peu de gens ont à ce point pu vivre le slogan de la revue «Gazoline»: “Vivre au quotidien la voiture ancienne”. Elle a été ma maison, mon moyen de transport, mon amie… Il faut la laisser maintenant, et ça fait mal aux tripes. Je m’arrache de mon siège, claque pour la dernière fois la porte avec son bruit sec caractéristique, ferme à clef. Il faut l’habiller pour un repos bien mérité.
Voici la dernière vision que j’ai de la «Petite» avant que les deux battants rouillés et grinçants se referment sur elle. Dors bien, «Petite», je reviendrai! Et les plus belles aventures sont encore devant nous: les glaces du Lac Baïkal en mars, l’immensité du désert de Gobi l’été prochain. On va en baver, mais on va y arriver! Avec Toi je sais que je peux aller au bout du monde! Et nous continuerons de raconter au quotidien ce que nous vivons, pour que d’autres, par procuration, vivent un peu l’aventure avec nous.
Rencontres humaines – une photo d’un « témoin » tous les 1000 km :
0 km – Paris, le 16 juin 2007. Point de départ officiel du périple. Nous sommes au kilomètre zéro d’un voyage de 16.000 km.
1000 km à Friedewald (Allemagne). Wolfgang Weinert profitait de son dimanche matin ensoleillé pour faire du vélo.
2000 km à Tychy (Pologne). Leszek Szafinski goûte sa bière du soir.
3000 km depuis Paris dans un petit hameau avant la ville d’Uman (Ukraine). Suliga Galina Jakovlevna vend des pommes, des concombres et des oignons sur le bord de la route. Contrairement aux apparences, qui sont – on le sait – trompeuses, elle est scientifique de formation. Après des études de météorologie, elle a travaillé pendant de longues années à Tulun, en Sibérie. Rapatriée en Ukraine pour des raisons de santé, elle y travaille jusqu’à sa retraite. Après 44 ans de boulot comme fonctionnaire qualifié, elle touche une pension de 480 grivni (environ 70 euros). Pas étonnant qu’elle soit obligée d’arrondir ses fins de mois! Elle se souvient aussi de la guerre: «Les Allemands sont venus et ont encerclé le village. Tous ceux qui avaient entre 16 et 30 ans ont été déportés en Allemagne pour du travail forcé. Ceux qui ont travaillé dans les fermes sont revenus. Mais on n’a jamais revu ceux qui étaient ouvriers d’usine.» Elle même n’a que 14 ans à l’époque, mais les Allemands la raflent aussi. Son père se rend à la “Kommandantur” et réussit à racheter Galina…
4000 km. Anna Alekseivna Patroucheva a 22 ans et elle tient une petite épicerie (“Produkti”) sur le bord de la route près d’Orlyne (Crimée).
5000 km de Paris à Belaya Kalitva (Russie). Notre témoin est un jeune homme de 19 ans, travaillant comme pompiste pendant ses vacances. Il s’appelle Igor Michailovitch Orlov et il est étudiant en électrotechnique.
6000 km à un carrefour près du village d’Ivantieyevka (Russie). Rajabovitch Fazilov est originaire de la ville de Kurgan-Tübe au Tadjikistan. Il a 48 ans et travaille comme camionneur à Samara. Il vient d’avoir un accrochage avec une voiture sur la route principale («C’était la faute de l’autre!») et attend l’arrivée de la police pour que celle-ci dresse un constat. J’espère qu’il tombe sur des DPS sympas et non notre couple de pourris de hier (voir blog): ils risquent d’être racistes en prime, et la parole d’un Tadjik contre celle d’un Russe…
7000 km sur la route entre Zlataoust et Miass. Viktor Mikhaïlovitch Gorbatchev (non, ce n’est pas un parent!) attend le bus. C’est un mécanicien retraité de 75 ans, qui a passé la matinée à cueillir baies et champignons dans la forêt.
8000 km à Ishim (Russie). Notre témoin, Sergueï Kamolov, a 35 ans et vient de souder notre tuyau d’échappement qui s’était ouvert. Il loue le garage dans lequel il exerce ses fonctions de directeur. Son rêve: posséder un jour son propre atelier et l’équiper comme il faut.
9000 km dans la ville d’Ob, juste avant Novosibirsk. Tatiana Lashena, 26 ans, est serveuse dans un “Kafé” routier.
Nous atteignons les 10.000 km juste après Krasnoyarsk, un peu avant Ouyar. Jana Vladimirovna Nosova a 27 ans et elle est comptable dans une compagnie de construction.
11.000 km de Paris et une quarantaine de kilomètres avant Irkoutsk. Yelena Nazarienko, 30 ans, est serveuse au “Kafé Yolki-Palki” à Angarsk.